Travailler au Japon – L’Hexagone – レグザゴン, une école de français à Tokyo

Deuxième épisode de notre série d’articles « Travailler au Japon ». Aujourd’hui, nous allons à la rencontre de Florent, Toulousain vivant à Tokyo depuis quelques années et qui a récemment créer son entreprise à Tokyo. Afin d’en savoir un peu plus sur son parcours et son expérience, nous avons souhaité lui poser quelques questions. Nous tenons à la remercier de nous avoir accordé cet interview et d’avoir accepté de partager son vécu.

Bonjour Florent, peux-tu te présenter et nous parler de ton parcours?

Je m’appelle Florent, 31 ans. Je suis d’origine Corse, mais suis né à Talence et ai quasiment toujours vécu dans la banlieue Toulousaine (Muret pour être précis). Après avoir fini mon M2 LEA (Langues étrangères Appliquées) à l’université Toulouse II Jean-Jaurès en 2010 (le Mirail à l’époque…), je suis parti en échange université à l’université Chuo à Tokyo pour un an. J’ai malheureusement dû revenir plus tôt que prévu en Mars 2011 à cause du grand tremblement de terre (ça fait déjà 8 ans, que le temps passe vite !). Cependant, cela n’a pas égratigné le moins du monde mon envie de continuer mon expérience au Japon. J’y suis donc retourné avec un visa Vacances-Travail 2 ans plus tard après avoir mis un peu d’argent de côté. Après avoir fait quelques baito et passé le JLPT N2, j’ai réussi à trouver un travail en tant que recruteur d’élèves et professeur d’anglais à ESMOD, école de mode française située à Ebisu, dans Tokyo. Ce travail m’a permis de renouveler mon visa pour un visa de travail. 9 mois plus tard, j’ai décidé de me lancer plus sérieusement dans l’enseignement, mais cette fois-ci du français. Je suis donc rentré dans une école de langue en passant par correspondance dans le même temps le diplôme FLE (Français Langue étrangère). J’ai fait de nombreuses rencontres dans cette école, aussi bonnes sur le plan professionnel que personnel. Deux ans et demi plus tard, je créais mon école avec deux autres collègues.

Tu as ouvert il y a quelques mois une école de Français à Tokyo, peux-tu nous en dire un peu plus ?

Cette école, au nom de l’Hexagone, est une école centrée sur les cours privés, mais qui va bientôt proposer des cours en groupe restreint de deux ou trois personnes maximum. On y enseigne le français en japonais, mais aussi en anglais pour ceux qui veulent. Pour faire court, nous nous adoptons aux besoins des étudiants. Nous prévoyons de déménager dans un futur proche dans un beau bâtiment qui va ressembler à un mini château français dans le quartier chic d’Aoyama. Ce bâtiment a en réalité été dessiné par un de mes anciens étudiants avec qui j’ai gardé contact et avec qui je suis devenu très proche. Il en sera aussi le propriétaire. Nous avons d’ailleurs ensemble pas mal de projets, notamment en France. L’école est aussi partenaire avec une société japonaise  qui envoie les étudiants en France afin d’étudier et/ou de rester en famille d’accueil. Elle nous présente les étudiants afin qu’ils puissent parler un minimum français et se débrouiller avant de partir.

Comment est venue cette idée ? Quelles sont les difficultés que tu as rencontré lors de la création ?

L’école dans laquelle mes collègues et moi-même travaillions était très mal gérée. En plus le patron, un Français, a eu un comportement déplacé avec des élèves. Choses que l’on ne savait pas au début, évidemment. Lorsque cela a fait surface, nous ne pouvions plus moralement travailler dans une telle école. De plus, nous avions déjà dans l’idée de faire une école à notre image, honnête et proposant des cours de qualité avec de vrais professeurs (chose rare dans le monde des écoles de langue au Japon). En bref, une école qui saurait donner envie aux étudiants d’aller en France et de découvrir ce magnifique pays. Seulement, la création de l’école n’a pas été une balade tranquille. Le premier problème auquel j’ai dû faire face fut le visa. J’étais jusque là en visa Travail, sponsorisé par mon ancien employeur. En quittant l’école, j’ai été contraint de changer en visa Auto-entrepreneur / Manager en créant l’école et devenant ainsi Président de celle-ci. Cependant, ce visa n’est pas aisé à obtenir. Il faut rassembler pas mal d’argent, et les formalités sont plutôt compliquées. J’ai heureusement été aidé par mes collègues ainsi que mon couple d’amis japonais. Ils m’ont présenté leur notaire que j’ai payé pour m’aider dans la création de l’entreprise et pour mon visa. Ce fut une période assez éprouvante et stressante !
Une autre difficulté – qui n’est pas toujours facile à appréhender – est de bien choisir les personnes avec qui faire affaires. La nature des personnes peut parfois nous surprendre, autant dans le bon que dans le mauvais…

Quels conseils donnerais-tu à quelqu’un qui souhaite lancer son entreprise au Japon ?

Le réseau est d’une importance cruciale au Japon. Les relations humaines peuvent devenir un problème épineux pour un étranger (surtout français) dans une société où codes et normes sont nombreux et la maîtrise de ceux-ci sont décisifs. Il faut donc les comprendre et les appliquer un minimum pour survivre. Ainsi, étudier sans cesse la culture ne sera que bénéfique. Aussi, étudier le japonais régulièrement peut ouvrir des portes. L’impact est radicalement différent lorsqu’un étranger peut parler japonais assez naturellement et utiliser le langage poli.
Ce que je vais dire ensuite va paraître un peu paradoxal. Le Honne et Tatemae est la base de la société japonaise. Honne étant ce que l’on pense vraiment, et Tatemae le visage que l’on se doit de montrer à la société, ce qui est acceptable par les autres. Il est bien sûr important de comprendre ce concept et de l’appliquer dans la mesure du possible, mais il est aussi, à mon avis, important de s’en détacher lorsque le moment s’y prête. Ainsi, on pourra laisser une forte impression tout en restant dans les limites de « l’acceptable ».
En ce qui me concerne, je suis resté moi-même et ai parlé ‘avec le cœur’ aux personnes que j’estimais dignes de confiance. C’est mon caractère. Les japonais ne sont pas habitués à cela. Cela repoussera certains, déstabilisera d’autres, mais en charmera beaucoup, qui verront que vous êtes sincères et honnêtes, et qu’il peuvent compter sur vous (cela vaut autant sur le niveau personnel que professionnel). Les gens se rendent comptent de la supercherie si vous n’êtes que du vent.
Pour résumer, mon conseil est de travailler sur sa faculté d’adaptation (nécessaire si vous voulez évoluer dans la société japonaise), tout en restant soi-même, et en gardant sans cesse conscience des différentes règles à observer dans un environnement fondamentalement différent de ce que l’on peut voir en France.

Vous avez aimé cet article ou vous avez des questions, n’hésitez pas à laisser un commentaire.

 

 

2 réflexions au sujet de « Travailler au Japon – L’Hexagone – レグザゴン, une école de français à Tokyo »

  1. Bravo Florent, merci de représenter positivement la France et d’avoir partagé ton expérience, d’une part, et transmis de précieux conseils, d’autre part. Je te souhaite un épanouissement total dans ton entreprise, beaucoup de succès eu égard au sérieux et à l’honnêteté dont tu fais preuve.

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